Il n’existe actuellement aucun traitement curatif capable de guérir les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Certains médicaments permettent toutefois d’améliorer la qualité de vie des patients en aidant à contrôler les symptômes moteurs de la maladie, comme les tremblements ou la lenteur du mouvement. Malheureusement, le traitement pharmacologique le plus utilisé, faisant appel à la lévodopa, entraîne des effets secondaires indésirables à long terme. S’intéressant à ce problème, l’étudiante Laure Chagniel, doctorante en biologie cellulaire et moléculaire (option neurosciences) à l’UQTR, mène des recherches pour le développement d’approches thérapeutiques novatrices dans le traitement ou la prévention des effets secondaires invalidants associés à l’utilisation de la lévodopa. Ses résultats de recherche, fort prometteurs, offrent une lueur d’espoir aux malades parkinsoniens.
«Chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson, les problèmes moteurs résultent d’un manque de dopamine dans le cerveau, dû à la mort de neurones dopaminergiques. Sans dopamine, les neurones du mouvement ne peuvent recevoir les messages nécessaires au contrôle des fonctions motrices du corps. Les traitements pharmacologiques actuels ont donc pour but de rétablir ou d’imiter la dopamine. La lévodopa, utilisée depuis plus de 40 ans, s’avère un traitement symptomatique de choix puisqu’elle est convertie en dopamine dans le cerveau, d’où l’amélioration des fonctions motrices chez les malades», d’expliquer la chercheuse.
La lévodopa n’est cependant pas une panacée. La majorité des patients traités, soit 90%, développent des effets secondaires invalidants après neuf ans. Ces effets consistent en des mouvements anormaux involontaires et excessifs appelés dyskinésies. À ce jour, aucun médicament n’est disponible pour prévenir ou atténuer ces mouvements indésirables, d’où l’intérêt de Mme Chagniel à mieux comprendre les mécanismes moléculaires sous-jacents à l’apparition des dyskinésies.
Arrivée à l’UQTR en 2005, en provenance de France, Laure Chagniel a d’abord obtenu un baccalauréat en biologie médicale, réussissant ensuite un passage direct au doctorat en biologie cellulaire et moléculaire, sans rédaction de mémoire de maîtrise. Récipiendaire de bourses de recherche prestigieuses, elle a participé à plusieurs congrès internationaux et publications scientifiques. Elle mène ses travaux de doctorat au sein du Groupe de recherche en neurosciences de l’UQTR.
Des découvertes stimulantes
Des études récentes montrent que les dyskinésies causées par l’utilisation de lévodopa pourraient être reliées à une modification des flux de calcium dans le cerveau. Ce dérèglement entraînerait une suractivité chez des protéines calcium-dépendantes impliquées dans les fonctions neurologiques. Partant de ce constat, Mme Chagniel a concentré ses recherches sur deux protéines calcium-dépendantes. Elle a mené ses travaux chez des rats de laboratoire, modèles de la maladie de Parkinson.
«Nous avons vérifié si l’inhibition de protéines calcium-dépendantes pouvait agir sur l’émergence des dyskinésies. Nos résultats se sont révélés vraiment encourageants, particulièrement avec la protéine appelée calpaïne. En utilisant un inhibiteur de la calpaïne pour bloquer l’action de cette molécule, nous avons observé une diminution de 70 % des mouvements excessifs involontaires causés par la lévodopa. Plus important encore, ce résultat positif n’a pas nui aux effets bénéfiques antiparkinsoniens de la lévodopa. Une diminution de 70 % des mouvements involontaires est très intéressante, car il est rare de trouver dans la littérature une telle réduction des dyskinésies par des agents pharmacologiques, sans que ceux-ci portent atteinte à l’effet positif de la lévodopa», constate Mme Chagniel.
Cette découverte importante a fait l’objet d’un article publié, en janvier 2012, dans la prestigieuse revue internationale Neurobiology of Disease.
«Nous avons aussi fait une autre observation fort intéressante au cours de nos recherches, rapporte Mme Chagniel. Nous avons constaté que l’inhibiteur de la calpaïne stimule aussi la production de cellules progénitrices ou précurseures des neurones. Ces cellules expriment l’enzyme impliquée dans la synthèse de la dopamine, soit l’enzyme capable de fabriquer de la dopamine. Ce résultat est particulièrement motivant.»
L’étudiante doit maintenant poursuivre ses recherches afin de mieux comprendre pourquoi l’inhibition de la calpaïne produit tous ces effets positifs. Elle doit vérifier si l’agent pharmacologique utilisé pour inhiber la calpaïne entraîne des effets secondaires et à long terme. Elle veut également savoir si l’inhibiteur de la calpaïne peut stimuler la production de neurones exprimant non seulement l’enzyme nécessaire à la fabrication de la dopamine, mais la dopamine elle-même.
«Tous ces projets sont réalisés dans le but de mieux comprendre quels sont les éléments du cerveau impliqués dans la maladie de Parkinson. Cela nous aidera à développer des médicaments dépourvus d’effets secondaires invalidants et à trouver un traitement à long terme pour permettre aux patients parkinsoniens de mieux fonctionner, tout en diminuant les coûts pour la société. Nos travaux contribuent également à une meilleure compréhension du rôle des neurones et de la dopamine dans l’acquisition et l’apprentissage des habiletés motrices», mentionne Mme Chagniel.
La maladie de Parkinson
Près de 100 000 Canadiens sont atteints de la maladie de Parkinson. Cette affection neurodégénérative progressive perturbe principalement le mouvement volontaire et contrôlé. Elle résulte de la destruction de cellules dans une partie du cerveau appelée substance noire. Ces cellules sont chargées de produire un neurotransmetteur chimique, la dopamine, qui sert de messager entre les cellules du cerveau contrôlant les mouvements du corps. (Source : Société Parkinson Canada)