Alors que l’image d’un conflit des nationalités lors de la Rébellion est largement présente dans la mémoire collective, certains pans de la réflexion des patriotes restent inexpliqués. Pourquoi la Déclaration d’indépendance de 1838 vise-t-elle à établir une république qui se servira «des langues françaises et anglaises dans toutes matières publiques»? Comment comprendre leurs allusions à une république des deux Canadas et à une annexion aux États-Unis? Pour tenter d’interpréter cette activité intellectuelle débridée, ce qui est le propre de tout moment révolutionnaire, nous mettrons la lumière sur une dimension inexplorée par les historien(ne)s: l’utopie de ce qu’ils nommaient «l’amalgame» des nationalités, qui ne peut se comprendre qu’en l’associant à l’idée du droit naturel à conserver sa culture. Si cette logique confirme la volonté des patriotes de préserver l’héritage français, elle signifie également que la nation dont ils rêvaient aurait tenté d’établir une coexistence pacifique des nationalités.