L’avis psychologique
Collaboration de Sylvie Robidoux, psychologue au service de psychologie des Services aux étudiants
Marie-Pierre a reçu une invitation pour participer au premier party de son programme et elle n’ose pas y aller car elle a peur de ne pas savoir quoi dire à ses nouveaux collègues, et qu’on la trouve ennuyeuse. Mathieu a une présentation orale à faire pour un cours. Il n’a pas dormi de la nuit, a la nausée et des tremblements à l’idée d’affronter tous les regards posés sur lui. Olivier voudrait bien parler à sa collègue de classe qui l’attire vraiment beaucoup mais il n’ose pas, par peur d’être rejeté. Toutes ces situations ont en commun de susciter, à des degrés divers, de l’anxiété sociale. Mais qu’est-ce que l’anxiété sociale?
L’anxiété sociale est principalement une difficulté à être avec l’autre, un malaise ressenti en face d’autrui. C’est un phénomène répandu qui comporte plusieurs formes, soit le trac, la timidité et la phobie sociale, qui varient en intensité et qui ont des répercussions plus ou moins importantes sur la vie des personnes concernées.
Le trac et de nombreuses appréhensions correspondent à une anxiété sociale intense mais passagère qui suscite un inconfort ponctuel, limité à certaines situations et à certains moments, souvent directement associés à une performance à exécuter devant public. L’anxiété n’altère pas de façon importante la qualité de vie de l’individu.
La timidité correspond à une manière d’être (trait de personnalité), à une tendance à rester en retrait et à éviter de prendre l’initiative dans différentes situations sociales. L’anxiété est plus importante que pour la moyenne des gens et apparaît uniquement dans certaines situations sociales, par exemple parler avec de nouvelles connaissances. Ce comportement d’inhibition sociale s’exprime surtout avec des inconnus. Une personne timide va parler avec plus d’aisance à un interlocuteur rassurant ou familier et arrivera à s’adapter aux situations anxiogènes. Bien que les gens timides en souffrent, la timidité comporte tout de même ses avantages. Les qualités associées à la timidité sont nombreuses: bonne capacité d’écoute et d’empathie, bon sens de l’observation, discrétion, dévouement aux autres, bon esprit d’analyse, etc.
À un niveau extrême d’anxiété sociale, on parle de phobie sociale. La phobie sociale consiste en une peur ou une anxiété marquée ou intense de diverses situations sociales ou de situations dans lesquelles la personne est susceptible d’être observée et jugée négativement par autrui. La personne qui souffre de phobie sociale craint d’agir de façon humiliante ou embarrassante, par exemple en rougissant, en tremblant, en transpirant de façon excessive, en bafouillant ou en figeant. La personne phobique va développer de nombreuses stratégies pour éviter les situations sociales qui l’inquiètent. Cette tendance à l’évitement interfère avec la vie professionnelle ou avec les relations sociales habituelles.
Faire face à ses peurs
C’est une tendance naturelle chez l’humain de vouloir fuir ou éviter quelque chose qui nous effraie. Toutefois, la peur ne permet pas d’éviter le danger. Au contraire, l’évitement renforce la peur. Paradoxalement, plus nous évitons une situation, plus cette situation nous paraît insurmontable. Chez les personnes anxieuses socialement, l’évitement peut devenir un fonctionnement de tous les jours, un mode de vie qui s’organise autour des peurs.
Heureusement, il est possible de passer de l’évitement à la confrontation des peurs par l’exposition. L’exposition est le fait de se confronter en douceur (progressivement et graduellement) aux situations redoutées, tout en restant parfaitement conscient de la situation, c’est-à-dire sans vous forcer à penser à autre chose et sans chercher à rendre la situation moins anxiogène (se cacher derrière des lunettes de soleil ou un portable, prendre de l’alcool ou des médicaments, etc.). Il est bien important de respecter vos limites: ne vous obligez surtout pas à rester dans la situation si cela devient trop insupportable.
Apprendre à s’affirmer
La personne qui a peur des autres peut douter de ses compétences sociales. En évitant les interactions sociales, la personne phobique a moins souvent l’occasion de développer des habiletés sociales de base telles que regarder son interlocuteur, sourire et parler de façon audible. En développant des compétences sociales, l’individu améliore son sentiment de contrôle et même la maîtrise réelle d’une situation et, par conséquent, arrive à diminuer son anxiété.
Une des conséquences de la timidité est la difficulté à s’affirmer face aux autres: peur de demander, de dire non, d’émettre ou de recevoir une critique, etc., le plus souvent par peur de la réaction de l’autre, plus précisément par crainte d’être rejeté ou agressé par l’autre. Bonne nouvelle: s’affirmer est quelque chose qui s’apprend. Pour bien s’affirmer, il est indispensable de bien communiquer, c’est-à-dire de développer la capacité d’exprimer clairement à l’autre ses besoins, ses désirs, ses valeurs, sans trop d’anxiété, et en respectant l’autre dans ce qu’il est et ce qu’il souhaite.
Penser autrement
Enfin, il n’est pas possible de surmonter sa peur des autres sans modifier sa façon de penser et surtout la tendance à considérer que les autres ont un jugement négatif et qu’on est soi-même sans intérêt. Il est d’abord nécessaire d’identifier ses perceptions erronées, puis apprendre à les modifier en étant plus réaliste et en nuançant. Il est donc important de se pencher sur ses perceptions et ses propres croyances et de tenter de les remettre en question.
Finalement, consulter un professionnel peut permettre à une personne aux prises avec de l’anxiété sociale invalidante de trouver un appui pour expérimenter de nouvelles façons de faire et d’être avec les autres. Le Service de psychologie des Services aux étudiants peut vous aider dans cette démarche. Pour prendre rendez-vous, vous pouvez vous adresser au secrétariat au 819 376-5011, poste 6056, ou vous présenter au local 1261, pavillon Albert-Tessier.
Références
André, C. et Légeron, P. (1995). La peur des autres : trac, timidité et phobie sociale. Paris, O. Jacob. 272 p.
André, C. (2011). Secrets de psy : ce qu’il faut savoir pour aller bien. Paris, O. Jacob. 354 pages