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Vendredi fou ou Black Friday?

– Réflexion linguistique de Benoit Leblanc, professeur associé au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR –

J’ai peu à dire en ce qui concerne l’emploi du terme anglais Black Friday, sinon que l’aspect historique de l’évolution de ce mot aurait pu être intéressant à prendre en compte dans son analyse, voire pour éclairer le choix d’un équivalent français adéquat. Mais, une petite recherche à son sujet ne m’a pas permis de trouver des informations valables: toutes les histoires relevées en guise d’explications qui auraient pu être utiles s’avèrent anecdotiques, donc linguistiquement peu fiables. Car la question qui se pose au Québec est: doit-on considérer ce mot comme un emprunt linguistique abusif et inutile?

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Benoit Leblanc, professeur associé au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR.

Comme réponse,  on peut considérer Black Friday comme un emprunt intégré qui ne met pas en jeu l’intégrité du français. On peut aussi le comparer avec l’intraduisible Halloween, de l’anglais All Hallow Even, «veille de la Toussaint», qui est un emprunt inséré depuis longtemps dans l’usage et dont l’emploi n’est pas remis en question.

Dans ce cas, je dirai avec humour, que le Black Friday est pareil à l’Halloween et au jour de l’An.  Comme le dit la chanson: «Ça arrive  einqu’une fois par année!». L’usage de ces mots est donc chronologiquement restreint.

À ce sujet, il vendredifoufaut aussi examiner l’avis formulé dans le Grand dictionnaire terminologique  (en ligne) de l’Office québécois de la langue française, soit celui de déconseiller Black Friday et Vendredi noir au profit de Vendredi fou ou Mégasolde d’avant Noël (2013). Sur le site Termium + de La banque de données terminologiques et linguistique du gouvernement du Canada, on peut lire que Black Friday et Vendredi noir sont à éviter en proposant uniquement Vendredi fou pour dénommer cette traduction américaine (2013). Pour leur part, d’autres dictionnaires anglais-français en ligne, moins reconnus (Linguee, Reverso, etc.) traduisent par Vendredi noir.

Cela dit, lequel s’insérera dans l’usage, que l’on dit roi, c’est-à-dire le  lexique commun à l’ensemble des groupes sociaux constituant une (notre) communauté linguistique. En éliminant d’emblée Mégasolde d’avant Noël, terme trop long et imprécis (quand avant Noël?), la lutte se fait à trois, soit Vendredi fou, Vendredi noir et Black Friday. Les paris sont ouverts, on s’en reparle dans quelques années.

Pour conclure, le phénomène d’intrusion de mots anglais dans le français québécois est connu et répandu depuis longtemps, on pourrait contrer cette invasion en construisant un mur de briques entre le Québec et les États-Unis et en adresser la facture à Donald Trump. Il sera sûrement d’accord pour la payer…

Dossier Vendredi fou: nos experts font la lumière sur ce phénomène!

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