Hommage à Jacqueline Champagne Prud’Homme (1929-2014)

Hommage à une grande dame, Mme Jacqueline Champagne Prud’Homme (1929-2014)

Le 28 décembre 2014, Mme Jacqueline Prud’Homme, une pionnière québécoise de l’intervention systémique, s’est éteinte. Cette femme exceptionnelle a laissé dans le deuil non seulement ses enfants et petits-enfants, mais aussi plusieurs générations de cliniciens au Québec et en Europe.

Pendant plusieurs décennies, Mme Prud’Homme a partagé ses connaissances, sa rigueur clinique, son art de vivre et sa passion des familles. C’est à titre de psychothérapeute, de formatrice et de superviseure clinique que son rayonnement au Québec et en Europe s’est étendu. Une telle contribution concerne à la fois les instituts de formation et la communauté universitaire. Mme Prud’Homme fut une grande instigatrice de l’approche systémique auprès des familles. Avec feu Gérard Duceppe, Roch Pelletier, Michel Lemieux, Frédéric La Belle et Jacques Soucy, cette femme influente a collaboré au changement de paradigmes dans les soins en santé et services sociaux du Québec.

Femme de cœur et de conviction, Mme Prud’Homme a soutenu la valeur et enrichi la pratique professionnelle d’un grand nombre de thérapeutes : «Jacqueline avait ce don de nous faire sentir unique». Attentive aux divers niveaux de réalité et à la complexité, elle savait relier le monde intrapsychique et le monde des relations. Sa curiosité l’a incitée à approfondir ses réflexions sur la souffrance humaine et à vouloir en saisir davantage les enjeux. Systémicienne hors pair, elle a poursuivi sa formation en psychanalyse afin de mieux connaître les enjeux interpersonnels mais aussi intrapersonnels, à tenter d’établir des ponts entre les diverses approches. Même à 80 ans, elle continuait à superviser et était une précieuse ressource pour plusieurs d’entre nous.

En 2008, lors d’une allocution, elle affirma que «L’histoire, c’est la transmission, le lien intergénérationnel, un patrimoine qui construit l’avenir» (Prud’Homme, 2008). Dans cette perspective, nous avons voulu contribuer à la mémoire de cet héritage puisque cette transmission a été faite, principalement, de façon orale au Québec francophone. Une série d’entretiens avec des formateurs issus de la première génération de cette pratique familiale a été réalisée à l’UQTR dans le cadre d’un projet sur La transmission intergénérationnelle d’une pratique familiale : approche systémique au Québec (Éditions CEIDEF/UQTR). En 2012, elle a partagé ses réflexions sur les interventions de ses collègues et échangé avec les étudiants de psychoéducation et ceux de psychologie.

Pour faire suite au visionnement d’un entretien réalisé peu de temps avant la fin de sa vie, une de mes étudiantes témoigne que ce qu’elle a retenu de Mme Prud’Homme, est son ouverture sur les gens, sa maîtrise des approches théoriques et des interventions, mais surtout, son amour de l’être humain, dans ses forces et faiblesses (Gabrielle Gauthier, 2012). A notre tour, nous voulons témoigner de sa grande générosité et de sa contribution exceptionnelle comme femme et intervenante. Ce que je retiens d’elle, c’est l’espoir en l’être humain (clients et intervenants) et à sa capacité de nous rendre meilleur et unique. Son travail a été d’une grande rigueur et d’une grande sensibilité comme seuls les grands virtuoses savent le faire. Merci!

Lyne Douville, professeure au Département de psychoéducation
et chercheuse régulière au CEIDEF

Jean-Pierre Gagnier, professeur au Département de psychologie
et chercheur régulier au CEIDEF